La Zarra : 1er Album « Traîtrise »

“Tu t’en iras“ a rythmé l’été 2021 et révélé au public français La Zarra. Alors que paraît des deux côtés de l’Atlantique Traîtrise son premier album de “variété ­urbaine“, rencontre avec une artiste réservée mais bien décidée à faire entendre sa (très) belle voix.

La Zarra - Photographe Fifou, la nouvelle voix de la chanson française.
La Zarra – photo Fifou

Un voile de mystère plane sur de La Zarra. Qui est cette artiste dont personne n’avait entendu parlé il y a encore quelques mois et qui est aujourd’hui l’objet de toutes les attentions?
Je comprends que pour certains je sorte un peu de nulle part. Je suis née au Québec et ai grandi dans la banlieue de Montréal, dans une ville appelée Longueuil. Je viens d’une famille nombreuse où j’ai eu une enfance à la fois heureuse et tout à fait normale. J’ai habité toute ma vie dans ce petit patelin à 15 km de Montréal. Que dire de plus?

On vous a découvert il y a un an avec l’envoûtant “À l’ammoniaque Mon Dieu“, mashup de PNL et Edith Piaf. Votre album propose également cette audacieuse alliance de hip hop et grande chanson française. D’où vous est venue cette mosaïque qui mixe beat urbain percutant, violon et piano classieux, sonorités ­arabisantes?
Ce n’est pas une idée, c’était juste inévitable. J’ai grandi avec deux genres musicaux. J’ai appris à chanter en ­écoutant la variété d’antan. Je n’arrivais pas à chanter à mon maximum en entonnant du R’n’B ou tout autre style autre que la variété française. Cependant, je suis une enfant des années 90 qui a grandi avec la musicalité ­novatrice du hip hop. Cette musique est aujourd’hui très puissante sur le marché du disque. J’ai grandi avec les Blackstreet, 2Pac, Mariah Carey ou encore Aaliyah. C’est pourquoi “À l’ammoniaque“ ne me paraît pas audacieux, mais totalement naturel. Quand vous lisez un texte de rap, vous lisez de la littérature, de la poésie. Aussi je ne fais aucune sorte de différence entre un texte de variété ­française et de hip hop. Avec ce premier opus, il ­m’apparaissait important de montrer ces deux facettes musicales qui me constituent et qui ne font qu’une.

La Zarra “À l’ammoniaque Mon Dieu“, mashup de PNL et Edith Piaf

Vous révélez avoir embrassé ce métier par hasard, le lendemain d’une soirée arrosée où vous avez ­interprété du Céline Dion. La Zarra, enfant, ne rêvait-elle pas d’être un jour artiste?
Je ne rêvais pas de carrière… rien n’est impossible, mais le rêve me semblait un peu loin tout de même. C’est comme être astronaute, gagner au loto. Une fille de Longueuil ne peut pas être une vedette de la chanson. Aujourd’hui c’est vrai que c’est plus facile de se lancer dans la musique à l’heure des plateformes numériques. Quand j’ai rencontré Benny Adam, il faisait déjà ­énormément de musique, en autodidacte, avec son ­ordinateur. J’adore cette indépendance et cette liberté ­créatrice que lui offrent ses outils informatiques. Notre ­rencontre a été salvatrice. Il a appris à me “dégêner“. Le plus gros problème en somme c’était moi. Je n’assumais pas mes envies de créer. À la maison, je n’osais pas ­chanter trop fort de peur que ma mère m’entende, encore moins de chanter devant un auditoire, de peur du ridicule. Benny a su me donner confiance en moi. Et puis l’envie de chanter est bien plus forte que mes peurs. C’est la seule façon que je connaisse pour exprimer toutes mes ­émotions, les mettre en mots et en images pour que ­l’auditeur entre dans mon univers.

Justement La Zarra c’est aussi une image très travaillée. D’une sensualité assumée et sincère. Comment avez-vous construit votre alter ego?
Je suis une grande cinéphile. Marilyn Monroe et Audrey Hepburn sont des actrices qui me fascinent pour leur ­intelligence, sensualité et leur dérision combinés. Le ­cinéma des années 50 m’attire pour plusieurs raisons. Son glamour en tout premier lieu: les femmes y étaient ­magnifiées, sophistiquées et jamais vulgaires. Leur corps étaient célébrés, mis en valeur. Avant je n’aurais jamais pu porter de telles robes et j’ai cette chance pour la scène et les clips d’arborer des tenues de créateurs. Je savoure ce plaisir. Ces tenues, ces images, ces visuels, tout part de moi. Je les écris comme une extension de moi. D’ailleurs quand j’écris mes paroles, je vois aussi tout l’univers visuel qui s’y rattache.

L’efficace “Tu t’en iras“ a rencontré un très joli succès en France. Il reflète cependant peu l’univers musical très riche de votre premier album Traîtrise. Pourquoi un tel choix?
Cette chanson est arrivée à la toute fin de l’écriture de ­l’album. On la fredonnait sans plus puis elle s’est imposée d’elle-même auprès de l’équipe. Après elle fait partie d’une stratégie. Le marché étant très difficile à pénétrer, il ­m’aurait été compliqué de proposer comme premier single une valse. Tu t’en iras est le titre up tempo d’une inconnue qui avait tout pour accrocher le public. C’est une chanson que j’aime beaucoup et je pense que mes prochains titres ­lorgneront du côté de ce style musical.

La Zarra – le tube Tu t’en iras

Ce succès totalement soudain, comment le gère-t-on au quotidien?
Ma vie n’a pas changé si ce n’est que je travaille beaucoup plus. Sans doute que je n’ai pas encore réalisé le chemin parcouru. Cela fait deux ans que je travaille nuit et jour sur “Traîtrise“. Quand on m’annonce que le single est un ­succès, ma nomination aux NRJ Music Awards ou que les critiques apprécient l’album, je suis choquée en fait. Et cela me rend tellement fière. Pourtant, dans la vie peu de chose m’émerveille. Sans doute que c’est mon coté mélancolique, terre à terre aussi. Après j’adore tout ce que je vis en ce moment, car je m’amuse énormément. Il n’y a pas que le travail après tout!

“Pas le cœur à la fête“ est sans conteste la chanson qui m’a le plus emporté. Vous dîtes l’avoir écrite alors que vous vous trouviez dans un chalet pendant une tempête…
Oui, cette chanson a été écrite en deux étapes. Le refrain fut fredonné à Paris “Ça va, ça vient, ça va J’ai pas l’cœur à la fête“… J’ai laissé reposer pendant 7 mois au Québec. Puis sur l’île d’Orléans où je passais la soirée, s’est levée une tempête. Je ne sais pas si c’est l’isolement, la nature environnante et déchaînée, mais j’ai trouvé tout de suite les mots pour clore cette chanson. Elle parle de cet état autodestructeur que vous pouvez avoir quand vous venez d’être quitté par l’être aimé et que vous êtes prêt à tout pour le remplacer, pour oublier.

La Zarra – Tout Feu Tout Flamme

La scène est la prochaine étape. Une découverte qui vous angoisse autant qu’elle vous excite. Comment vous y préparez-vous?
J’ai très hâte, car cela signifie que je vais à nouveau ­entrer en création. Les chansons de l’album vont très ­certainement être revisitées en piano-voix, telles qu’elles le furent à l’origine. Je rêve de concert très intimiste, de ­revisiter l’album, de nouveaux formats. C’est stimulant de donner une nouvelle couleur à “Traîtrise“. Laisser la voix et les instruments résonner jusqu’au cœur et au corps du public, voilà ce que je souhaite. Oui je n’ai plus ­d’appréhension, j’ai seulement hâte.

Propos recueillis par Cédric Chaory
Traîtrise – La Zarra (Universal Music)

Cover album traîtrise - La Zarra
La Zarra – Album Traîtrise